Il est désormais clairement établi que l’impact de la pandémie a été d’une ampleur sans précédent sur l’industrie du transport maritime et nombreuses sont les parties prenantes ayant exprimé leur mécontentement face aux conditions de marché particulièrement favorables aux transporteurs maritimes. Face aux congestions inédites et aux perturbations de la chaine logistique, les chargeurs américains étaient bien décidés à faire entendre leur voix, menant in fine à l’action du législateur.
C’est ainsi que la réforme de l’Ocean Shipping Act a vu le jour, signée le 16 juin 2022 par le président Biden. Ce texte a été adopté de façon bipartisane par le Congrès, et représente le changement le plus important depuis l’amendement de l’acte en 1998. Selon le président Biden, la hausse des prix subie par les chargeurs est due aux agissements des alliances maritimes, formées d’armateurs de nationalités étrangères, qui tirent avantage des familles et des entreprises américaines. Il affirme en ce sens que la réforme de l’Ocean Shipping Act a pour but de mettre un terme aux pratiques de ces armateurs. (Conférence de presse signature de l’OSRA, 16 juin 2022).
Parmi les nouveautés apportées par la réforme, on trouve notamment des prérogatives élargies au profit de la Federal Maritime Commission (FMC). En effet, cette réforme donne le pouvoir à la FMC d’initier des enquêtes sur les pratiques commerciales des transporteurs maritimes et d'appliquer des mesures coercitives. Elle apporte par ailleurs une attention particulière au processus de facturation de frais de surestaries et détention, notamment par le transfert de la charge de la preuve du demandeur au transporteur maritime, mais surtout par l’apport d’une liste de mentions obligatoires devant figurer au sein des factures émises par les transporteurs.
Ces dispositions figurent à la section 7 de l’acte intitulée « common carriers ». Les mentions obligatoires sont les suivantes :
- Date de mise à disposition du conteneur.
- Le port de déchargement.
- Le ou les numéros du conteneur.
- Pour les expéditions exportées, la date de retour la plus proche.
- La franchise autorisée en jours.
- La date de début de la franchise
- La date de fin de la franchise
- La règle applicable en matière de détention ou de surestaries sur laquelle le taux journalier est basé.
- Le ou les taux applicables selon la règle applicable.
- Le montant total dû
- L'adresse électronique, le numéro de téléphone ou autre information appropriée de contact pour les questions ou les demandes de réduction des frais.
- Une déclaration selon laquelle les frais sont compatibles avec les règles de la Federal Maritime Commission relatives aux détentions et aux surestaries.
- Une déclaration selon laquelle la performance du transporteur n'a pas causé ou contribué aux frais facturés sous-jacents.
L’acte dispose en outre que le fait de ne pas inclure les informations requises sur une facture de surestaries ou de détention élimine toute obligation pour la partie facturée de payer les frais applicables.
L’acte est d’application immédiate et suite à la réception de plaintes, la FMC a procédé à de nombreuses enquêtes concernant les pratiques de compagnies maritimes. Il est disponible sur le site du Congrès.
Pour conclure, si les Etats-Unis ont mis en place un système de régulation dans la facturation des frais de détention et surestaries par les transporteurs, ils demeurent les seuls à avoir réagi en conséquence des pratiques de ces derniers. Les problématiques de congestion et surcharges supportées par les chargeurs n’étant pas résolues, il apparait opportun que d’autres juridictions s’emparent de la question et s’inspirent du modèle américain et du signal fort envoyé à travers cette réforme.