Le règlement qui permet aux armateurs de déroger aux règles de la concurrence qui prévalent au sein de l'Union européenne est attaqué de toutes parts. Saisie par 10 organisations professionnelles en juillet, la Commission européenne a lancé une consultation pour recueillir les avis des professionnels de la supply chain, en vue de prolonger ou non ce règlement d'exemption après 2024.
L’urgence de la révision du règlement européen Consortia Block Exemption Regulation
Dans une lettre adressée en juillet dernier à Margrethe Vestager, Commissaire européenne en charge de la Concurrence, 10 organisations professionnelles (clients, opérateurs et fournisseurs des compagnies maritimes) alertaient les autorités européennes sur la nécessité de revoir sans plus attendre le règlement Consortia Block Exemption Regulation (CBER).
Ce texte européen reconduit en 2020 pour 4 ans permet en effet aux compagnies maritimes, réunies en alliances ou consortiums - dont la part de marché est inférieure à 30 % - de coopérer sur le plan opérationnel (partage de capacités, coordination des itinéraires et des horaires...) et de fixer leurs prix de manière indépendante. Cette dérogation aux règles européennes de la concurrence est octroyée en vertu du postulat selon lequel elle profiterait aux usagers du transport en se traduisant par une baisse des prix et une meilleure qualité de services. Arguments déjà maintes fois contestés et remis en cause par les chargeurs.
En ouvrant un appel à consultation de toutes les parties prenantes de la chaine d’approvisionnement - chargeurs, transporteurs, transitaires, exploitants de terminaux – la Commission souhaite mesurer l’impact des consortiums entre compagnies et du règlement CBER sur les opérations depuis 2020.
Objectif :
déterminer si le CBER doit expirer ou être à nouveau prolongé, avec ou sans modifications.
Pour les organisations internationales et européennes représentants les clients des compagnies maritimes ainsi que l’ensemble des fournisseurs de services opérant en Europe, la position est sans appel : le règlement BER doit être révisé.
Des bénéfices au détriment de la chaine d’approvisionnement
Les professionnels des places portuaires souhaitent une révision immédiate, sans attendre donc le terme fixé au 25 avril 2024 estimant que les exemptions au droit général de la concurrence dont bénéficient les compagnies maritimes ne sont pas partagés équitablement.
« De nombreuses traversées ont été annulées ou détournées. Les taux de fret ont plus que quadruplé sur de nombreuses routes et continuent de rester trois à quatre fois plus élevés qu'en 2019 avant la pandémie (…)
Les opérateurs européens ont subi d'énormes perturbations dans le transport de marchandises par conteneurs depuis le dernier renouvellement du règlement sur les alliances maritimes en avril 2020. La capacité des transporteurs maritimes de conteneurs à gérer collectivement les impacts, tout en générant des bénéfices totalisant plus de 186 Md$ en 2021, au détriment du reste de la chaîne d'approvisionnement démontre que quelque chose ne va pas »
Dans une récente publication sur les performances du transport maritime, l’International Transport Forum (ITF), organisme de l’OCDE, est allé plus loin encore en suggérant que les autorités ont facilité la hausse des taux de fret maritime et la crise actuelle de la chaîne d'approvisionnement en créant un cadre juridique favorable aux alliances et aux consortium.
Pour en savoir plus sur ce dossier, rendez-vous le 8 décembre à la Commission Maritime de 14 heures 16 heures 30